02/06/2018
Tarzanides du grenier n° 301
En fin d’année 2005 ou 2006 quand mon épouse et moi bavardâmes avec une des dernières dames de la rue Saint Denis, nous entendîmes celle-ci rouspéter contre tous les changements apportés à son environnement.
D’abord se plaindre de la disparition des salons de coiffure de proximité. « Rendez-vous compte : on en avait deux rien que rue Blondel ! aujourd’hui, zéro. Je dois remonter à pinces le Sébasto plus loin que Gare de l'Est… Et encore ! j'ai rien que des boutiques où elles font le décrêpage ou la touffe afro. Je leur en mettrais, moi : »
– C’est la déroute des blondes.
– Plaisantons pas avec ces choses ! Vous savez qu’a fallu que j’avertisse mes habitués ? Vous ne me verrez plus en manteau de fourrure sur le ruban, que je leur ai dis. L’autre jour, un groupe de femmes est passé avec des écriteaux. J’ai pas eu le temps de les lire. Je me suis faite agonir… Je me suis planquée dans le couloir. Je leur ai juste crié que c’était du faux, pas du vrai. C’est du vrai bien sûr ! je l’ai payé assez cher, mon renard !
– Tu devrais écrire tes mémoires. T’as connu des tas de gens. Tu nous as souvent dit avoir… Enfin t’as dit avoir connu Michel Simon.
– Lui ou les autres… Je suis en bout de piste, je sais. J’en ai gros sur la patate à voir la rue comme elle est. Ou, pour mieux dire, comme elle n’est plus.
Il n’y a pas que les femmes qui doivent renoncer en public à se blottir dans de la fourrure. Il y a aussi leurs compagnons humains, réels ou mythiques qui ont dû se débarrasser de tout vêtement en peau d’animal. Tenez : le plus connu dans le genre « homme des bois » : TARZAN. Regardons l’image BD d’en dessous. Doc Jivaro l’a sortie du numéro mensuel 23 de SAGEDITION, année 1974.
Bravo ! Vol plané réussi pour tomber sur le râble d’un esclavagiste fournisseur de jolies filles pour le harem du grand vizir. Mais reculons plus de dix années vers l'arrière, en 1951. Nous retrouvons cette même scène avec quelques modifications.
Le pagne est dessiné façon « peau de léopard » alors que dans la réédition en 1974 le marquage de l’animalité a été gouaché, rendu invisible par la censure. On détecte même un autre « détail » qui joue à cache-cache : le poignard escamoté dans l’image en couleurs, réapparaît dans l’image imprimée noir sur blanc.
– Dis donc elle n’a plus l’air d’avoir le moral, la fille.
– Pourtant, c’est à croire qu’elle met un point d’honneur à rester la seule survivante en piste. Tu sais qu’elle raconte avoir été présente lorsque "ils' ont sorti un Monseigneur inconnu par l’escalier pour pas que la police le trouve mort dans une piaule ?
– Elle peut prouver ce qu’elle dit ?
Doc Jivaro
19:21 Publié dans BD, BD anciennes, Brèves du trottoir, Grenier de la BD, Journaux, Moeurs, Sexualité, Société, Tarzanides | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tarzan, tarzanides du grenier, bandes dessinées de collection, bd anciennes, sagédition, rue saint denis, paris, bob lubbers
26/05/2018
Tarzanides N° 300
Vous allez être tous d’accord entre vous pour conclure que les « femmes de mauvaise vie » ne doivent pas disposer d’un espace dans les journaux destinés aux enfants. Et je vous laisse volontiers votre opinion sur ce sujet. D’autant qu’en France la loi du 16 juillet 1949 a tranché : dans les journaux pour l'enfance interdiction totale de textes et d’images (même sous une forme allusive), ayant trait au commerce prostitutionnel. Et pourtant …
Et pourtant voyez l’image que Doc Jivaro vient de prélever dans l’album récits complets TARZAN numéro 12 édité en 1955.
Trois hommes discutent bruyamment, l’un deux porteur d’un chapeau colonial. Les deux autres sont visiblement des matelots dont les mœurs ne semblent pas être celles que dessinait le Jean Cocteau de Jean Marais. Aussi remarquons-nous qu’à l’écart, dans leur dos, est assise une capiteuse personne blonde. C’en est une à coup sûr, non ? Alors, loi de 1949 ou pas loi, l’infraction est caractérisée : une prostituée visible dans un illustré pour la jeunesse. Quelle t'honte ! Et ne me dites pas que les gamins que nous étions ne devinaient pas de quelle dame du cru il s’agit.
Mais peut-être préféreriez vous cette jolie fille maquillée, peinte de couleurs voyantes auxquelles sa profession recourt souvent ? dans ce cas, la revoici :
Nous venons d’isoler son image loin de toutes les images du journal dans lequel elle parut en 1952. (L’hebdomadaire TARZAN numéro 281 de février 1952, le neuvième jour du mois qui était un samedi, jour du sabbat.)
À cette époque, dans le pays de Mata Hari et de Marthe Richard le titre Tarzan était divulgué sous trois aspects principaux : hebdomadaire, mensuel et bi-annuel.
Le numéro 281, nous le possédons en trois exemplaires. L’un des trois fut contrôlé par la Commission de Surveillance en date du 21 mars 1952. En fait foi le tampon à l’encre violette dont la première page est frappée en haut à droite.
Ces messieurs de la censure étaient nommés par le garde des sceaux. Ils purent donc constater qu’une seconde infraction à la Loi de 1949 existe dans ce même numéro 281. En voici la teneur :
Deux images extraites de la série NAT du Santa Cruz
Hein ! cette fois encore on ne va pas tergiverser en prétendant quelque malentendu sur la qualité de la jeune femme à laquelle un marin offre du feu pour allumer une clope. Rien ne manque à la scène classique, ni le lampadaire, ni la ruelle incivile, ni l'ombre dont les couples éphémères font leur complice.
En ce temps d’avant-hier, notre TARZAN était édité à 300 000 exemplaires chaque semaine, s’attirant la jalousie de concurrents politisés. Del Duca, son éditeur, paraissait intouchable, protégé qu’il était par l’énorme succès de sa « Presse du Cœur ». On ne pouvait pas le tuer on pouvait l’estropier. C’est ce qui arriva lorsqu’on lui supprima son droit d'acheter des lots de papier à moindre prix, lot de papier qu’il utilisait pour imprimer TARZAN. C’était un manque à gagner pour le grand patron des Éditions Mondiales. Compenser cette perte ne pouvait se faire qu’en augmentant le prix de vente unitaire du journal, ce que le porte-monnaie populaire aurait mal accepté. Homme d’affaires mieux encore qu’éditeur, Del Duca préféra saborder TARZAN.
Le lecteur pourra se reporter à la date du 17-01-2015 et constater que dans le numéro 95 des Tarzanides du Grenier le sujet avait précédemment été traité quant aux déambulations nocturnes d’une courtisane en zone portuaire.
Mais dites donc Doc Jivaro c’est ici votre trois centième rubrique des Tarzanides du Grenier et vous n’avez rien trouvé de mieux qu’une grue sur talons hauts pour fêter cet anniversaire ?
Rien de mieux en effet.
Doc Jivaro
18:10 Publié dans Arts, BD, BD anciennes, Fanzine, Grenier de la BD, Journaux, Tarzanides | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tarzan, nat du santa cruz, bob lubbers, del duca, loi de 1949, censure, Éditions mondiales, tarzanides, bandes dessinées de collection, bd anciennes
31/03/2018
Les Tarzanides du grenier n° 291
TARZAN ET LES FEMMES
Un bon siècle avant la libération politique des femmes (libération que certains chimistes attribuent à un déficit de réserve hormonale chez l’homme) un bon siècle avant, donc, de jeunes et jolies filles se permettaient déjà de malmener le puissant fils des grands singes.
Copyright, année 1951,
Vignette de Bob Lubbers
Ici, dans un monde grouillant de lilliputiens, une princesse plante un coup de couteau dans la chair du héros ; lequel semble ne réagir qu’avec une docilité satisfaite. Croirait-on qu'un homme pareil pourrait devenir le client des anciens salons de défunte Madame Claude ?
Les relations entre Tarzan et les femmes ne sont jamais apaisées puisque que jamais franchement accomplies à cause de manquements sexuels répétitifs. Cela apparente de façon tout a fait inattendue Tarzan et le commissaire Maigret. On sait que ce policier rencontre des centaines de prostituées sans jamais accomplir l’acte qu’Abélard accomplissait avec Héloïse avant que l'époux de celle-ci vienne trancher dans le vif du sujet.
Mais vous allez m’interrompre : « Voyons ! le commissaire Maigret est un homme marié. Comment douter de SON viril ? ».
À quoi Madame Lamalice répond : il n’a jamais été papa, Jules ! ni julot. Il est mort sans engrosser sa femme.
Vous voyez bien qu’un soupçon d’impuissance peut subsister.
Doc Jivaro
17:07 Publié dans Arts, BD, BD anciennes, Blog, Fanzine, Grenier de la BD, Le Petit Censeur Illustré, Media, Moeurs, Sexualité, Tarzanides | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bd, bandes dessinées de collection, bar zing, doc jivaro, tarzanides, commissaire maigret, tarzan, salon madame claude
03/03/2018
Les Tarzanides du grenier n° 288
Dès la première semaine que Doc Jivaro passa dans l’École des Beaux Arts appliqués à l’industrie (Bourges) il entendit fort bien que la bande dessinée ne s’y trouvait pas en odeur de sainteté.
Apprendre à bien dessiner. Ce résultat ne se comprenait qu’en présence d’un modèle vivant, ou du moulage en plâtre d’une feuille d’acanthe. " Mesurez, prenez les proportions, utilisez le fil à plomb … Repérez d’abord les grandes surfaces, comparez-les mentalement aux figures géométriques simples, etc."
L’étude visuelle d’une nudité humaine primait avant tout. Il fallait travailler sur papier Ingres d’au moins 180 gr et de dimensions réglementaires 50 × 65. Le crayon ou le fusain, et le modèle : une femme nue, ni moche, ni belle, capable de ne pas se grattouiller la fesse pendant une quinzaine de minutes en position debout, immobile. Lorsque le prof aperçut mon œuvre, il s’exclama quelque chose comme : “ c’est habile, c’est fait de chic ! Mais pour progresser abstenez vous de faire des guignols comme on les fait dans les illustrés populaires ! ”.
J’étais cuit, vexé sans le montrer.
Trois ans passèrent et c’était l’école des B.A. de Paris où la BD n’était pas non plus encourgée. (La grande mode du moment c’était l'Art Abstrait) (Prière de mettre des majuscules vraiment grosses). L'ambiance hostile à tous les petits Mickey, explique en partie comment je ratai la première apparition d'Astérix dans le journal Pilote année 1959.
Cependant, attention ! mon enfance connut UDERZO lorsqu’il signait AL UDERZO dans les pages du KID MAGAZINE de l'année 1948. Ou encore lorsqu’il exhibait l'athlète BELLOY en page une de l'hebdomadaire OK.
BELLOY L’INVULNÉRABLE (rien que ça !). Nous y repérons certains effets graphiques inspirés du style de Burnes Hogarth (La gestuelle de la reine Zamora et de sa soeur jumelle. Le tracé des flots tumultueux dans le Trésor de l’Île Fantôme).
Bon ! on ne va pas en écrire 4 pages Médor.
Au fait : semblerait que deux commentateurs du blog Bar Zing aient échangé des propos entre Astéix, Attila et le renoncement à toute résistance.
A bientôt. A lundi je veux dire.
Doc Jivaro
18:40 Publié dans Arts, BD, BD anciennes, Enseignement, Fanzine, Grenier de la BD, Journaux, Tarzanides | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : enseignement artistique, École nationale supérieure des beaux arts de paris, École des beaux arts de bourges, uderzo, burn hoggarth, burnes hogarth, belloy l'inastérix, médor, art abstrait, bd, bandes dessinées de collection, tarzan, bar zing, doc jivaro, tarzanides
24/02/2018
Les Tarzanides du grenier n° 287
Pour s’attribuer un semblant d’excuse à ne pas être présent à l’ouverture du Salon de l’Agriculture Doc Jivaro vous parle, ici, d’un certain KORAK.
S’il est un adolescent autant vigoureux que courageux et qui mérite amplement de se tenir debout dans l’Olympe des Tarzanides c’est bien lui, c’est bien KORAK.
Dans les films américains des années 30, 40 et 50, la censure recommandait de faire disparaître tout allusion à un rapport sexuel entre TARZAN et SA Jane. Autrement dit : tout enfant vivant auprès d’eux en famille ne pouvait qu’être qu’un enfant adopté. Un garçon sans identité, comme « tombé du ciel ». Et, justement, l’enfant adopté allait être le rescapé d’un avion accidenté dans lequel ses parents disparaissaient morts inconnus. Et puisque c’était un garçon, il recevait pour nom « BOY » ce qui revenait à ne le faire subsister qu’anonyme.
Mais, heureusement, dans les romans de Burroughs l'homme singe et sa belle anglaise pratiquent des étreintes amoureuses positives et c'est bel et bien un garçon « fruit des entrailles » de sa maman qui vient au monde.
Les aventures de TARZAN et de KORAK (son fils véritable) furent d'abord communes à l’un et à l’autre. Les planches américaines étaient réussies par Russ Manning. Mais plus tard, le père et le fils se séparèrent, chacun accomplissant des exploits distincts de ceux de l’autre.
L’éditeur SAGÉDITION s’était réservé d’exploiter le copyright de TARZAN. Les deux pages ci-dessus sont sorties du numéro 43 de TARZAN année 1983 et leur placement côte à côte n’est qu’une improvisation due à votre serviteur.
Sagédition disparaîtra en 1987 n’ayant que rarement publié des BD françaises. Sa fin augurera d’une totale disparition des bandes dessinées populaires de petit format. Ainsi le fameux Kiwi, né en 1955 cessera d’exister après son numéro 582 de l’an 2003.
Doc Jivaro
18:19 Publié dans Arts, BD, BD anciennes, Grenier de la BD, Journaux, Tarzanides | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : tarzan, korak, sagÉdition, bd, bandes dessinées de collection, tarzanides, bar zing, doc jivaro, russ manning
10/02/2018
Les Tarzanides du grenier n° 285
Depuis le 14 octobre jusqu’au 25 novembre de l’année 1950, le grand hebdomadaire d’aventures TARZAN nous raconta l’épisode pendant lequel le champion inventé par Burroughs affrontait RAMBUL.
– Qui est ce encore que celui-là ?
– C’est un caïd commandant toute une smala de pillards.
Tarzan est capturé, ligoté par des cordes solides qui l’enserrent contre un pilier. Les dessins sont signés de Cardy dont l’identité complète s'écrivait : Nicholas Viscardi.
Les quelques images BD semblent avoir été inspirées par un film réalisé mais pas réussi et dans lequel on voit l’homme de la jungle prisonnier de vilains pas beaux tout moches militaires nazis. Le titre est TARZAN TRIUMPHS. La date 1943 et la pellicule d'une courte durée : 75 minutes. C’est un navet.
Lorsque Johnny Weissmuller a tenu le rôle il approchait de la quarantaine et sa silhouette commençait à trop s’épaissir pour un personnage tout en souplesse. C’est aussi le cas dans les dessins de BD signés de CARDY et c’est pourquoi nous supposons que le bédéiste utilisa quelques-unes des photos du film.
Plus tard, beaucoup plus tard, en 1964 l’éditeur italien Ponzoni transcrivit en un roman-photos de 61 pages le film de la RKO. Toutefois le titre en était changé pour devenir JUNGLE APPELLE BERLIN, et le nom de ANTAR remplaçait celui de TARZAN.
Signalons que dans ce cinéma américain, l'aspect politique a été atténué par le fait que les nazis ne portent pas de brassards marqués de la croix gammée.
Mais que, surtout, le nombril de Weissmuller est caché sous un pagne attaché au-dessus des hanches. Explication : le code de pudeur HAYS interdisait de montrer la blessure cicatrisée laissée par la perte du cordon ombilical.
Tiens ça y est ! la neige recommence de tomber dans le jardin. Mon chat, qui est aussi celui de mon n’épouse, appuie son museau contre l’une des vitres d’une de nos fenêtres. Je le devine qui maugrée : "Ils ne vont pas me permettre de sortir à cause de ces foutus flocons !
Doc Jivaro
(qui essayera de faire mieux samedi prochain)
17:43 Publié dans Arts, Barzinguettes, BD, BD anciennes, Fanzine, Film, Journaux, Media, Tarzanides | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tarzan, antar, cardy, rko, johnny weissmuller, burrough, éditions ponzoni, bd, bandes dessinées de collection, tarzanides, bar zing, code haye, rambul, code hays