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09/05/2021

Tarzanide n° 497

Relisant quelques passages de la revue trimestrielle de BD PHÉNIX de mars 1976 j’ai stoppé sur l’affirmation suivante « Le premier en date de 1946 un mensuel appelé LE CASSEUR ». C’est Jean Fourié qui écrivit cela à propos de l’Éditeur CHOTT. Eh, non ! Le premier titre BD de cet éditeur fameux, en 1946, ne fut pas LE CASSEUR mais FANTAX alias Lord Neighbour alias Le Gentleman fantôme. Quant au cow-boy LE CASSEUR il ne devait paraître qu’en 1947.

 

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Malgré la simplicité des scénarios ou, plutôt, grâce à cette même simplicité animée de bagarres à grands coups de poing FANTAX s’attira l’enthousiasme des écoliers de l’époque ce qui d’un autre côté lui attira l’hostilité de beaucoup d’instituteurs. Aussi ce personnage tomba-t’il comme l’une des premières victimes de la censure votée le 16 juillet 1949. Son dernier numéro, n° 39, est édité en 1949.

 

 

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Une dizaine d’années passa, moi avec elle.

 

J’allais pour ne pas manquer le départ de la locomotive à charbon en direction de Bourges. Je longeais alors Le Miscailloux, un café-bistro qui faisait aussi office de commerce de Presse. A ce moment là, le titre des journaux était tourné vers l’extérieur afin d’être visible à travers la vitrine. Un mot accrocha mon regard de côté ; ce mot c’était FANTAX. Etait-ce donc l’éditeur Chott que je croyais disparu depuis une décennie qui se rappelait à ma mémoire ?

 

Je déposais 60 frs en monnaie sur le comptoir, devant le patron du bistro qui voyant mon achat ne manqua pas de s’essayer à l’ironie : « C’est pour vous ou pour votre petit-frère ? ».

 

- Pour moi !

 

Et comme je sortais j’entendis le bonhomme qui voulait mériter le dernier mot de notre bref échange : « Moi je lisais ça quand j’étais gamin ! ».

 

Avec son FANTAX d’une deuxième série commençant en 1959, l’Éditeur Chott profitait du succès d’un catcheur nouvellement triomphant sur les rings en France : L’Ange Blanc. Un succès renforcé par la démocratisation des TV dans les débits de boisson où l’on s’attroupait le vendredi soir après le turbin. Ce nouveau catcheur était masqué, se donnant pour mission de corriger tous les méchants combattants d’un sport truqué dont tous les spectateurs adultes connaissaient par avance le résultat. Ainsi FANTAX, soudain ressucité, était-il surnommé « L’Ange Noir » pour faire équilibre par contraste avec L’Ange Blanc.

 

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Cette seconde série FANTAX ne parut que pendant l’espace de neuf numéros que votre serviteur possède la conservant dans un coffre de Fort Knox sous la garde personnel de l’agent 007.

 

Doc Jivaro

 

24/08/2013

Le Petit Censeur Illustré n° 6

Notre paresse, qui devrait être proverbiale, nous dispense de répertorier chronologiquement l'ensemble des « Justiciers masqués » présents dans la BD française pendant les cinq années qui suivirent l'entrée de la Division Leclerc dans Paris.


La troupe américaine ayant précédé tous ses alliés, son implantation armée en France allait faciliter le retour des journaux « Comics » et autres « Petits Mickey » interdits depuis 1941 par l'occupant allemand. Ainsi un DONALD, dès 1947, était-il publié par Paul Vinkler - Opéra Mundi - pour tenter de rétablir la suprématie du commerce de l'imagerie yankee dans le pays de de Gaulle et Thorez. Les dessinateurs de bandes dessinées françaises, qui s'étaient amplement exprimés avec l'approbation de l'administration germanique depuis 1941, décidèrent de s'opposer à ce qu'ils dénonçaient comme une invasion étrangère venue d'Outre-Atlantique.


Pierre Mouchot fut l'un de ces patrons français qui combattirent la production américaine, mais sans donner un aspect politique à son combat. Il signait Chott. On lui doit d'abord la Bédé FANTAX, le plus retentissant de ses enfants. Ensuite, il fonda de nombreux personnages à succès, les perdit tous à la fin. Attaqué, malmené, persécuté (disons le sans exagération) il le fut par ses rivaux politisés. Il était bien français, pas américain ; et ce furent cependant des français qui le détruisirent. Peut-être cherchèrent-ils à faire oublier qu'ils demeuraient tous impuissants à briser l'efficacité commerciale américaine en France. Incapables de couper les ailes de l'aigle planétaire, ces messieurs cassaient les pattes du merle provincial.


Chott, en compagnie d'un Melwyn Nash créa en 1947, un BIG BILL le Casseur. Sur douze pages au prix de 12 fr.

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Un héros très musclé. Il tue. Il tue parce qu'il est impitoyable, pareil à Moïse qui faisait mettre à mort ceux des juifs qui refusaient d'adorer le dieu nouveau qu'il leur apportait.


Les meurtres que BIG BILL commet ne seraient que de sadiques assassinats si nous refusions de voir en lui un justicier solitaire se substituant à une police et des juges manquant à leurs devoirs. En somme, rien d'anarchique. Sherlock Holmes, avant BIG BILL agissait pareillement, supplantant Scotland Yard dans maintes affaires criminelles. L'influence de Lone Ranger « Cow boy masqué » publié en France dans le HOP-LA ! de 1939, est plus que plausible. Car de même que Lone Ranger est aidé par l'indien Tonto, BIG BILL le casseur est soutenu par le JAGUAR, un de ces emplumés peaux rouges qui scalpent aussi rapidement que gaiement chaque ennemi cloué au sol. Quant a BIG BILL, il casse les dents, disloque les mâchoires, écrase les vertèbres. Et lorsqu'on en sort vivant c'est pour en rester infirme.


Le CASSEUR BIG BILL fut publié sur 94 numéros en dépit des procès attentés contre son éditeur Mouchot. Ce dernier dut cependant accepter quelques sacrifices pour allonger la durée d'existence de  son champion. Par exemple renoncer à le dissimuler sous un masque. Et s'il résista beaucoup aux noirs bataillons des curés en soutane et des instituteurs en hussards de la République, il en fut finalement déchiré, jeté aux poubelles. BIG BILL le Casseur meurt, pourrait-on dire, au numéro cinq de RANCHO, année 1955.


Epuisé, ruiné, le créateur Mouchot-Chott est obligé de vendre ses EDITIONS RHODANIENNES à EDIT EUROP, un liquidateur qui se bornera à écouler les invendus ainsi qu'à fabriquer quelques titres d'une parution éphémère.

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Mais plus tard, surprise ! en 1961, EDIT EUROP place sur le marché de la presse, un COLORADO n° 1 – Il n'y aura d'ailleurs que quatre numéros ! - On y retrouve, inattendu, le BIG BILL de Mouchot-Chott. Seulement, en réalité, il ne s'agit que de la réimpression du premier épisode, celui antérieurement édité en 1947. Cette réimpression n'existe qu'après avoir passée par le couperet de la guillotine. Voyez donc : BIG BILL a définitivement perdu son masque. Il présente son visage tout nu – quelle impudeur ! et la lettre majuscule C sur son plastron, résumant le fracassant CASSEUR, est remplacée par un B (BIG BILL) parfaitement inoffensif.

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On ne devrait pas avoir à vous le redire : pendant la décennie 50 à 60, toutes les BD exhibant de fantaisistes  héros masqués seront interdites en France. ZORRO n'y échappa pas non plus lui qui, par le crayon de Oulié, réussissait bien aux dépens des ATOMAS et SATANAX, autres créatures BD françaises plus ou moins confectionnées selon la formule des BATMAN et des PHANTOM du Bengale.

 

Doctor Jivaro

(Insatisfait de son texte)

01/12/2012

Les greniers de la BD n° 13

 Coupez lui la tête et pendez le !

 

J'ai connu la BD d'avant 1949 lorsque j'étais gosse. J'en collectionne encore plusieurs titres. Aussi ai-je retrouvé, fouillant mes vieilles paperasses gardées sans soin, beaucoup d'images ayant en commun d'être impossibles à re-publier dans des albums destinés aux enfants d'aujourd'hui. 

Par exemple, un thème comme celui de la pendaison. 

On pendait « haut et court », souvent, dans les bandes dessinées de mon enfance. Je vous en présente au dessous quelques extraits. Leur petit nombre ne rend évidemment pas compte de la quantité de dessins BD consacrés à cette « justice expéditive » fréquente, dit-on, dans le Far West. 

Une évidence sociale en ressort pourtant. Une solide corde de chanvre vaut mieux qu'un long discours « droits de l'homme » lorsqu'il s'agit d'assurer la sécurité publique.


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Le bourreau ne va pas couronner « le géant bronzé demi-nu, roi de la jungle ». Il va l'étrangler – ou lui briser les cervicales. Mais Tarzan demeure d'un calme olympien sévère. Son « regard d'aigle » est pareil à celui que des artistes portraitistes français du XIXe siècle attribuaient à un corse « plus français que tous les français ». Un corse, Napoléon Bonaparte, dont l'Arc de Triomphe est encore utilisé (dévoyé ?) par des républicains démocrates incapables depuis 1874 de débarrasser leur mémoire des fastes impériaux de l'Empire Latin des Césars.

 

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Deux vignettes – choc sorties du n° 49 de JEUDI MAGAZINE, année 1947.

 

Un western produit par NORTIER qui en était à ses premières passes. Le titre ? Pionniers de l'Ouest. 

A cette époque, l'apprentissage du dessinateur se faisait fréquemment sur le tas. Même s'il rendait une BD plus ou moins bancale elle pouvait être publiée semaine après semaine. Au moins servait-elle à remplir une page ! et leur auteur devait se suffire d'être payé avec des clopinettes. 

NORTIER, une fois rodé, fera le relais avec POÏVET pour quelques planches des Pionniers de l'Espérance imprimées dans l’hebdomadaire communiste VAILLANT. 

On doit aussi à NORTIER un des Tarzanides de 1948 : TAO l'homme fauve, dont je vous parlerai avant la fin de l'hiver si la déesse des athées me garde vivant.

 

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L'éditeur CHOTT gagna une place de champion pour la création de situations cruelles dans les BD, visant les suffrages d'un public de gamins populaires français, tous rescapés de la seconde guerre mondiale. 

Le dessin est extrait du terrible Big Bill le Casseur n° 7, année 1947. 

Avant hier, lorsqu'un instituteur coiffé d'un béret d'ennui me tirait par l'oreille, c'était les ligues féminines de vertu religieuse qui s'alarmaient contre les ouvrages BD fabriqués par CHOTT. Aujourd'hui, si CHOTT se relevait d'entre les morts, ce serait la féministe libérée lesbienne qui gueulerait contre lui.  


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Ci dessus, vous avez été déçu, mon brave. On ne voit pas un seul pendu. Pourtant le texte est explicite : Il y bien deux pendaisons simultanées. Mais le dessinateur Le Rallic fut obligé d'en gommer les cadavres pour les remplacer par des lignes pointillées simulant quelque palissade. (On voit mieux ce détail dans l'original du n° 96 de Coq Hardi).


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Se balançant d'un seul bras, Tarzan poignarde éventre le guerrier noir qu'il vient de pendre à l'aide d'un lasso confectionné d'herbes tressées. Ainsi venge-t-il Kala, sa mère adoptive assassinée par l'ennemi. 

C'est après avoir tué cet indigène que Tarzan renonce à pratiquer le cannibalisme. Ce renoncement contraire à la nature première de l'homme, trouve sa compensation-consolation dans le vol du vêtement porté par l’ennemi abattu. Dans cette circonstance, en effet, le jeune Tarzan apprend à se vêtir. Mais s'il se vêt ce n'est évidemment pas par pudeur. C'est par la légitime appropriation d'un objet appartenant à l'ennemi vaincu. C'est une preuve matérielle de victoire.

 

Le paquet grossier du feuillage cachant les fesses du bel adolescent, n'est qu'une vulgaire concession faite à la censure par l'éditeur italien Del Duca. L'original américain, œuvre de l'excellent FOSTER, ignore cette pudibonderie.

 

Doktor Jivaro