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17/07/2016

Dimanche, jour du Seigneur n° 18

  

A l’approche du midi d’un des jours dominicaux, ma femme et moi passions à l’ombre du haut mur de l’église, du côté des marchands musulmans, lorsque brusquement tous les clapotements forains furent noyés dans un déluge de battements de cloches tout autour de nos têtes. A ne plus s’entendre parler.

 

- Il y va trop fort, le curé ! cria dans mon oreille mon épouse née dans une famille de vraie bourgeoisie pratiquante catholique.

 

Sûrement, oui, la prêtrise frappait trop fort. Et je m’amusais à supposer que le grand bruit des cloches secouées servait moins à célébrer l’office des fidèles qu’à faire s’écrouler le clocher.

 

Se rendre à la messe dominicale c’était obligatoire pour être bien accepté aux deux leçons de catéchisme en semaine. Me semble même me souvenir qu’il fallait faire pointer quelque carte de présence.

 

- Tu l’as oublié ta carte ?

- Ca ne risque pas. Ma mère l’a fourre dans ma poche et faut que je la lui rende à mon retour.

- Que tu lui rendes ta poche ?

- T’es con ! … Dis, on va faire une partie de baby-foot à la sortie ?

- Impossible ! j’ai failli prendre une raclée l’autre dimanche quand je suis rentré en retard qu’ils m’attendaient pour commencer à bouffer l’entrée de céleri-tomates.

 

A l’approche de la fin de la messe, tout le monde devait chanter l’allégresse d’être chrétien. Surtout catholique. Je ne me rappelle plus les paroles mais quelques unes surnageaient comme un refrain :

 

Je suis chrétien

Voilà ma gloire

Mon espérance et mon soutien.

 

Pour mon copain du moment et pour moi ce chant religieux correspondait vraiment à une délivrance : il annonçait la fin d’une heure d’ennui.

 

Nous allions nous retrouver libre dehors, sous le ciel, DANS le ciel, avec de véritables nuages. Nous allions échapper à la surveillance des statuettes en plâtre peint dont chaque visage fermé comme une serrure de geôlier épiait nos mouvements y compris les plus discrets. Surtout les mouvements de nos lèvres. Car assez rapidement une des phrases religieuses chantées par l’assemblée, se trouvait déformée, ici ou là, par quelques langues enfantines irrespectueuses. Le « Je suis chrétien » était trahi en un « Je suis crétin ».

 

C’était tellement facile.

 

- Tu crois que le curé il nous a repérés ?

- Mais non ! Mais non ! Il a autre chose en tête ! Il va aller manger dans la famille de la Grande Boucherie Charcuterie de la Place, où qu’il est invité  tous les dimanches. Y paraît que leur fils veut faire le séminaire.

- Le quoi ? Comment tu sais ?

- Je le sais c’est tout. Allez, bye ! Je cours en avant pour m’éviter une engueulade.

 

Ryal

 

 

29/05/2016

Dimanche, jour du Seigneur n° 12

Jour-du-Seigneur-12.jpg

15/05/2016

Dimanche, jour du Seigneur n° 10

 

Additionnant nos âges, Collette et moi étions parvenus à 18. Neuf ans pour elle, neuf ans pour moi. Égalité, parité. Sauf qu’elle venait de novembre quand moi je venais de décembre et qu’à présent encore je viens toujours du dernier mois de l’année … Alors qu’elle, Collette, est partie définitivement depuis pas mal de tours de terre autour du soleil.

 

Fils unique que je suis, je n’enviais pas Colette dont la grande sœur …

 

- Dont la grande sœur ?

- Elle est assmatique. Elle a de l’assme. C’est pourquoi mes parents ne veulent pas qu’elle sorte jouer.

 

Cet asthme devait être carabiné : la grande sœur disparut avant d’avoir atteint 16 ou 17 ans, je ne sais plus précisément.

 

Je connaissais bien Colette. Je connaissais aussi mais en moins bien une Nicole. Colette, Nicole. Il devait y avoir quelque chose de collant chez nos amies les filles.

 

Tout en avançant, Colette et moi bavardions avec beaucoup de précipitation dans nos phrases. En somme nous rivalisions mais en toute sympathie à savoir lequel des deux serait plus plaisant à se faire entendre de l’autre.

 

Je me rappelle que nous étions stoppés en bordure du trottoir avant de traverser la rue longeant la « maison des curés ». Notre arrêt ne se motivait pas par le passage de bagnoles folles comme des têtes d’automobilistes. Il y en avait peu des voitures filant sur le macadam, lorsque des centaines d’ouvriers pédalaient dans le sillage du gazole des trois gros cars bleus de l’usine Dunlop.

 

Brusquement, inattendue, une voix sans visage arrêta nos battements de langue :

 

- C’est ta sœur ? Non ! c’est ton frère ? Non !

 

L’Abbé C. venait d’apparaître. Nous ne l’avions pas vu tomber du ciel. Il atterrissait devant nos quatre sandales qui nous faisaient le pied plat. Et sa parole d’évangile se fit autoritaire. « Vous n’habitez pas au même endroit. Vous n’avez donc rien de bien à faire ensemble ».

 

C’était un jeudi. Colette et moi sortions du catéchisme, elle de chez les filles et moi de chez les hommes du futur. Une heure que la leçon avait duré ! Une heure qui me paraissait pleine d’au moins cent quatre vingt minutes. Et c’est long une minute qui s’attarde pendant trois minutes.

 

L’Abbé C. nous rappela aux bonnes mœurs journalières d’une grande grande ville comme Montluçon, et que nous devions les respecter jusque dans la petite petite ville populaire de Gozet

 

- Toi (c’était moi), tu pars devant, et toi (c’était elle) tu resteras en arrière jusqu’à ce qu’il ait tourné l’angle de la rue.

 

Tourner l’angle de la rue ! En voila une idée semblable à celle exprimée par ma mère en début de repas : si tu ne veux pas de la couenne, tu la mets dans le coin de ton assiette.

 

Comment repérer le coin d’une assiette toute ronde ?

 

Cette journée du jeudi, je ne revis pas Colette.

 

Quand elle fut à nouveau visible, elle se dirigeait vers l’École de la République, rue de la République. Pour y parvenir, elle devait passer devant l’autre école, l’école Voltaire, celle des garçons, rue Voltaire. Il y avait de l’ordre la-dedans.

 

Colette marchait sur le côté droit de la rue, respectant ainsi un des aspects du bel ordre public : les filles allaient sur le trottoir de droite, les garçons sur celui de gauche, en direction des deux écoles où la mixité était interdite. Au retour, les deux trottoirs, sans changer leur emplacement, changeaient de désignation : de droite l’un devenait de gauche pendant que de gauche son vis à vis devenait de droite. Les deux trottoirs échangeaient politiquement leur veste. Ça aussi, c’était de l’ordre, assurant sans doute l’inclinaison de la planète sur son axe.

 

Mais qu’est ce qui empêchait le garçon se rendant auprès de l’instituteur, de marcher sur le côté habituel aux filles ?

 

- Pour être taxé de « Jean la fille » ? Merci bien.

 

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Ryal

 

 

01/05/2016

Dimanche, jour du Seigneur n° 8

 

Nous le surnommions « Gros Pif », c’était facile.

 

Et c’était vrai qu’il le portait énorme en plein visage, son tarin. On aurait cru que ce nez ne lui appartenait pas mais que, en punition d’on ne savait quelle faute, Dieu lui en avait infligé le port encombrant.

 

Cependant, cet abbé savait faire apprécier sa gentillesse. A croire qu’il se servait d’elle auprès de nous pour que nous oubliions sa disgrâce faciale. Il tapait bien le ballon en caoutchouc mal gonflé entre nos pattes parfois mal chaussées.

 

Un jeudi, nous dûmes aller jusqu’à Lavault Sainte Anne, toute la journée, accomplir je ne sait plus quel devoir religieux. Quelque retraite préparant à la communion solennelle, peut être.

 

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Je craignais que le temps paraisse trop long devant ma patience assez courte. Alors, passant devant l’enseigne Le Miscailloux, j’achetai les seize pages de Coq Hardi. Prix : vingt francs.

 

Nez gros aperçut les feuilles du vice que j’avais entrouvertes en négligeant toute prudence par l’effet d’une gourmandise visuelle.

 

- On ne regarde pas ces choses en présence d'un prêtre ! … Je te le confisque. Je te le rendrai ce soir.

 

Cause toujours ! Plus de soixante années sont passées avec l’eau du ruisseau sous le pont de la rue du Repos, et j’attends encore que la faussement gentille soutane me le rende mon Coq Hardi – Au voleur !

 

Le lendemain et pour rattraper la perte, j’ai demandé à la mère de mon père de me prêter ou, plus chrétiennement, de me donner vingt francs pour acheter l’illustré mais sans préciser que l’Église venait de m’en faucher un exemplaire.

 

- Henriette ne te les a donc pas donnés pour payer ton journal de guignols ? Ah ! Ça y est, j’y suis ! Tu t’es acheté du chewing-gum avec.

 

Je mentis, disant oui sans trop articuler.

 

- Je t’ai pourtant prévenu que ça déboîtait les dents. Tu veux ressembler à Madame T … qui n’en a plus ?

 

Ryal

 

23/04/2016

Les Tarzanides du grenier n° 209

 

 

Présentement, t’aujourd’hui, les relations pacifiées entre le cinéma et la bande dessinée ne sont plus mises en doute. Chacun d’admettre que des films sont inspirés par l’imagerie des « petits mickey » tandis qu’à l’inverse des narrations en images ne sont que des versions dessinées de personnages et de situations cinématographiques. TARZAN – précurseur décisif – apparut d’abord sur l’écran des salles obscures avant de se mondialiser par la multitude de journaux illustrés.

 

La revue CINÉMA 71 consacra son double numéro 159 de septembre et d’octobre, aux relations de plus en plus évidentes que les films et les BD entretenaient pour fidéliser, chacun de son côté, un public disposant de plus en plus de congés payés. L’un des rédacteurs cinéphiles : Claude BEYLIE, posa d’emblée la question simple qui résumait la défiance qu’alors les officiels de la Politique et de la Culture manifestaient à l’encontre de nouvelles œuvres créées en dehors des arts traditionnels : « La bande dessinée est-elle un art ? »

 

 

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Le connaisseur et sa concurrente la connaisseuse (n’oublions pas nos n’mies les femmes) identifient d’emblée le valeureux FLASH GORDON ; que les enfants de chez nous assimilèrent sous l’appellation francisée de Guy L'éclair.)

 

 

Lorsque je voyageai jusqu’à Bourges pour entrer dans l’École des Beaux Arts appliqués à l’Industrie (une blague, non ?) la bande dessinée existait MAIS … Mais précisément et à contrario parce qu’elle existait il fallait la répudier en totalité, comme pour la rendre inexistante d’exister. Le plus vieux de nos professeurs, celui dont nous respections l’expérience autant due à l’âge qu’au talent, me surprenant à crayonner à la va-vite plusieurs tronches de cow-boys sur un coin de papier, m’assomma d’une phrase décourageante : ne gaspille pas ton don avec des guignols comme ça ! … Vlan ! c’était sabré. Vlan ! c’était terminus tout le monde descend ! A part le profil grec rapporté d’un bas relief de Phydias, ou encore le trait « enveloppant en ne conservant que des indices significatifs » dans le style Raphaël, aucun autre modèle n’etait valable, affirmait on, pour exercer votre regard et votre main. J’étais pourtant en 1959. Je n’étais pas en 1814.

 

Vers la fin de 1948, l’éditeur Del Duca, maître des domaines du roman photo et de la presse du coeur, lançait sur le marché le premier journal illustré hebdomadaire groupant des séries BD entièrement réalisées d’après des films applaudis par la vogue populaire.

 

Docteur Jivaro, la semaine prochaine, s’il n’est pas mort d’une indigestion de fraises importées du Maroc, bavardera sur le cas de L’INTREPIDE, hebdomadaire dont la pagination faisait la part belle au cinéma transcrit selon la manière d’une bande dessinée.

 

 

Doc Jivaro (MFCL)

 

 

20/04/2016

20 avril 2016. France Terre d'Asile

 

SCIENCE PEAU
A voile et à vapeur

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