12/02/2009
Paris en marche
C'était samedi, le jour d'après mes vaines prospections parisiennes où j'échouai à obtenir le numéro 5 de Targa. C'était samedi et je décidai, tôt matin, de me relancer dans une de ces randonnées pédestres auxquelles plus de quarante années de survie dans la capitale m'ont accoutumé.
Démarrant, Porte de la Chapelle je m'engageais sur les boulevards des Maréchaux jusqu'à Porte Bagnolet – Une sacrée trotte déjà ! Je m'aventurai, marché aux puces de Montreuil. Quelque fois, dans le passé, j'en reçus de bonnes surprises. En 1982, par exemple, un hasard bienvenu – aidé par le fait que je m'étais levé avant l'aube – m'avait permis d'acheter « au cul du camion » et pour la modique somme de 150 F deux gros albums Donald (1948)en bon état – les envieux apprécieront.
Ce bon souvenir m'encouragea à tenter ma chance, à nouveau, entre des stands plus ou moins désordonnés d'être plus ou moins légaux. L'espérance fait vivre : j'imaginais : que le numéro 5 de Targa s'était égaré tout bêtement dans le bric à brac, sous un ciel de terre mouillée. C'était moi qui devais mettre le grappin dessus.
Hélas ! Bredouille, je quittais le grand souk pour rejoindre l'avenue de la République par le boulevard des « gars de Menilmontant », tous disparus comme le canotier de Chevalier. Un trajet comme ça, ça vous chauffe les semelles ; ça vous fait les godasses plus petites que vos pieds.
Place de la République, un bruit de fond se réveilla dans ma tête … Tout un écho politique remonta dans mon corps. Un souvenir qui parut occuper l'espace tout autour. Mai 68 revenait, débordant de moi.
Des lettres mille fois scandées : CRS SS ! CRS SS ! Mille fois scandées et mille fois injustes, mille fois mensongères - L'injustice populaire toujours elle ! Quarante années écoulées et pas une pendant laquelle j'ai oublié de penser que si les CRS français s'étaient comportés en SS, Cohn-Bendi serait mort depuis belle lurette. C'aurait peut-être mieux valu pour sa biographie. Trépassé en héros martyr, notre jeune du « Mouvement du 22 mars » aurait gagné plus vite la postérité. Excuse moi de te le dire mais tu as raté ta sortie devant l'Histoire, pauvre Cohn ! Regarde : Rimbaud a réussi à nous faire croire être mort à 20 ans. Et toi te voici vieillissant, embourgeoisé député ! Comment pourrais-tu rester vert ? Tu ne boutonnes pas le col de ta chemise, tu te dis chaque matin : faut surtout pas que je me noue une cravate ! … Tu te le dis probablement en allemand mais ça reste que tu refuses d'accepter les ans qui passent et te dépassent. Tu n'auras pas été le James Dean de la politique. Allez, c'est pour quand la retraite Dany ?
Lorsque le pouvoir gaulliste engagea des poursuites judiciaires contre La Cause du Peuple
une dizaine de maquettes furent esquissées. dont celle ci-dessus.
Boulevard Bonne Nouvelle, voici le Musée Grévin. Grotesque, involontairement. Les gens du peuple n'y viennent que pour vous avoir en cire, sire ! Puis Passage Jouffroy, puis passage Vertd'eau. S'y abrite une librairie de BD. Lors des festivités du bicentenaire révolutionnaire en 1989, qui furent malmenées par toute la pantomime d'un mauvais Gould présidentiel, j'aperçus une affichette manuscrite collée sur cette vitrine BD. Approximativement je garde mémoire du sens des phrases : boutique fermée pour cause de bisanguinaire.
En sortant par la faubourienne rue Montmartre je me suis dit : stop ! J'étais à proximité de la rue Cadet. J'ai fait halte ; j'ai avalé je ne sais plus quoi, sur je ne sais plus quel comptoir, tout en regardant de côté, au dehors un type qui passait court sur pattes et dont la tronche teinture diode aurait dû – j'en reste certain - me rappeler sinon un nom, au moins un prénom ; mais non. 14 H 42 minutes exactement à mon bracelet montre. J'avais dû maigrir ; il me glissait autour de la main. D'avoir trop marché, je portais mes ripatons endoloris comme s'ils ne me portaient pas. Il était temps que j'aille reposer mes orteils torturés à la toile émeri.
Retour par Bd Bonne Nouvelle, j'ai fléché vers la Porte monumentale Blondel. Un Blondel pas Marc ; un Blondel François . Architecte. Ne pas confondre non plus avec le troubade d'arrière-train du Plantagenet à cœur de lion. Et, sois dit en passant, on ne réussira pas à convaincre les provinciaux ni à persuader les étrangers, que Pigalle et Blondel ne sont pas à cataloguer maquereaux.
Vous n'êtes pas sans remarquer qu'un mal causant partout la désertification, mal diagnostiqué « Sarkozisme aigü » réduit la présence des dames galantes dans votre environnement. Non seulement leur nombre diminue en public mais leur tenue vestimentaire se banalise en même temps. Une preuve : vous savez que plusieurs de ces travailleuses sociales besognent en vesture de cuir noir, accumulant toutes leurs forces pour la rencontre sado maso. Eh bien ! Figurez vous que des messieurs ont conseillé à ces femmes en noir de se présenter, dorénavant, tête nue dans la rue. Autrement dit, qu'elles devaient renoncer à se coiffer d'une casquette sombre plus ou moins imitée de celle d'un officier nazi. Explication avancée : des boutiques de fringues aux alentours sont gérées par des familles juives. Alors forcément c'est du plus mauvais effet, une casquette qui et que … etc.
M'ouais ! … Aura quand même fallu attendre au minimum trente ans avant qu'un tel « point de détail » (je parle du couvre-chef) apparaisse inconvenant dans les rues chaudes des anciennes halles. Toujours est-il qu'une brune solide, dompteuse de patrons autoritaires se serait exclamée :
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Puisque c'est comme ça je vais porter une casquette cheminot 1936 !
Parvenant jusqu'à Dieu, je veux dire jusqu'à l'Eglise Saint Eustache, je téléphonai à une copine d'en France. Elle me signala que la voie allait être libre. Pour passer le temps, je rodai par la rue qui vit périr Henri IV. Enfin je me rendis dans un immeuble où je traversai une cour étroite entre des murs aux volets clos d'où sourdait une rumeur de machines à coudre. A l'étage, un brave homme sortait mais à reculons pour ne laisser voir que son dos, tel un cambrioleur ayant oublié sa cagoule dans l'armoire fracturée.
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Entre ! Je me refais une beauté.
J'ai dévissé mes jambes fatiguées pour les mettre à tremper dans une baignoire d'eau fraîche. Vestiaire. Ouf ! Que s'arrête la pendule.
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Digestif ? Café ? Les deux ?
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Déca. J'ai un cœur moi.
Ryal
16:53 Publié dans Dessin humoristique, Moeurs, Politique, Sexualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cohn-bendi, hôtesse d'accueil, paris, sm, bar-zing, mao, targa