22/05/2016
Dimanche, jour du Seigneur n° 11
A l’approche de la fin de la messe, le dimanche (seul jour où je me rendais à l’église en vue de la prochaine Communion Solennelle), il y avait la quête.
Un plus grand que moi expliqua mais sans doute pour m’inquiéter :
« C’est chacun notre tour. C’est au cas où qu’on voudrait devenir un enfant de chœur. Pour s’habituer ».
- Je n’ai pas du tout envie d’être habillé comme une fille, moi.
Lequel des jeunes bandits joua à m’indisposer avec l’éventualité d’avoir à allonger mon bras avec en bout de main la corbeille du pauvre ? pas souvenance de son identité. Mais il insista, voyant mon manque d’empressement à servir de quêteur d’aumônes.
- Tu feras attention. Ils donnent tous des pièces de monnaie. C’est rare s’ils donnent des billets. Remarque, le dimanche, ils se font mieux généreux. Mais enfin c’est surtout de la ferraille. Alors tu feras gaffe.
- A quoi ?
- Aux boutons de culotte ! Il y en a qui trichent et qui donnent leurs vieux boutons. Si tu t’en fais refiler, les abbés te puniront.
- Non ?
- Si !
J’espérais bien ne pas avoir à tenir le rôle de celui qui circule des bancs jusqu’aux chaises pour demander la charité. Seulement, le malheur tombe toujours sur celui qui se fait le plus petit dans une assemblée de gens qui font, eux, tout leur possible pour bien se faire voir. Il a l’œil, le malheur. Et, un dimanche, pour la messe de onze heures, je fus désigné pour passer à la casserole. Malgré mon refus mental, je dus tendre la sébile en public.
Quand ce fut terminé, j’emmenais le pécule de la petite corbeille vers la sacristie.
L’avertissement donné par le grand garçon m’était revenu en tête dès le début du jeu de mendiant. Je me fis méfiant, me mettant à fouiller d’un doigt, puis de plusieurs doigts à travers les pièces de monnaie. Pourvu qu’il n’y ait pas de boutons de culotte !
Je n’en trouvai pas. Ouf ! soulagement. Mission accomplie mon capitaine.
Une demi heure plus tard, je me promenais dans le marché forain du dimanche, tout autour du temple, quand l’abbé C. apparut, une fois encore subitement, devant mes yeux qui ne guettaient vraiment pas la venue du Messie.
- Que je te parle, toi ! c’est pas vrai, tu n’as pas essayé de voler de l’argent de la quête ?
- (silence).
- Ne mens pas.
- Mais je n’ai pas volé d’ …
- Quelqu’un t’as vu.
- Non, je jure.
- Ah ! ne jure pas !
Je n’ai jamais appris le fin mot de ce soupçon. Un gamin, soit par erreur d’interprétation, soit pour me causer méchamment des ennuis, avait-il inventé ce truc pendable pour moi ?
On s’arrêta là . Ce fut tout, ce fut rien. Et je partis avec la sensation plutôt valorisante d’avoir au moins une miette de ressemblance avec leur fameux Jésus Christ : j’étais victime d’une injustice.
Ryal
09:38 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : montluçon, abbé chevalier, abbé sauvageot, souvenirs d’enfance, paroisse saint paul, cinéma des marais
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